LA BRUTE
La vie sans nuit
Paying for it c’était il y a un peu plus d’un an. Novembre 2019, au Théâtre national à Bruxelles, le collectif la Brute créait un spectacle sur la prostitution avec sur scène 10 actrices et acteurs portant la parole de 7 travailleuses et travailleurs du sexe, d’un inspecteur de la police judiciaire, d’un client et d’une féministe engagée aux côtés des travailleuses du sexe.
Qu’est-ce que Juliette aurait pensé de ce spectacle si elle avait pu le voir lors de sa reprise prévue au Théâtre National en février 2021 ?
Juliette travaille comme prostituée dans le quartier Nord à Bruxelles, rue Liné. Il y a un an, il était difficile de rencontrer des femmes comme elle, venues d’Afrique de l’Ouest. Des femmes qui rêvent d’une autre vie. Aujourd’hui, dans le milieu de la prostitution, les liens se resserrent, les solidarités s’organisent et les langues se délient. Plus personne dans les vitrines, les rues sont désertées mais le local d’Utsopi, l’Union des travailleuses et travailleurs du sexe organisés pour l’indépendance, reste ouvert. Là, Maxime et Marie rencontrés il y a un peu plus d’un an autour de la création du spectacle, et d’autres personnes encore, travaillent. Là, depuis la crise du covid, Juliette vient parfois trouver refuge.
Aujourd’hui, le Théâtre National lui aussi reste vide. Alors la Brute, un jour de neige, remonte le boulevard Emile Jacqmain, traverse la place Rogier, s’engage sous le pont de chemin de fer, emprunte la rue du Brabant, passe devant le commissariat de police, et longe les vitrines de la rue d’Aerschot. Là, les chaises des travailleuses du sexe sont laissées vides.
La nuit, ici, n’a plus de vie. Quartier Nord aujourd’hui, vitrine après vitrine, la vie s’ennuie jusqu’au numéro 208…